Autorisation de licenciement économique du salarié protégé : contrôle de la légalité externe

Comment déterminer si la décision de l’Inspecteur est légale ou illégale sur le plan de la légalité externe ?

1. Auteur de l’autorisation

Pour être légale sur le plan formel, la décision doit avoir été prise :

– par l’inspecteur du travail (le contrôleur du travail n’a pas cette compétence) dont dépend territorialement l’établissement auquel appartient le salarié licencié;

– par l’inspecteur du travail qui a procédé à l’enquête contradictoire, le juge administratif n’accepte pas la délégation de cette enquête à un contrôleur du travail ou à un autre enquêteur.

Comme toute décision administrative, l’original de la décision doit comporter la signature manuscrite de son auteur et la mention, en caractères lisibles, du nom, du prénom et de la qualité de celui-ci conformément aux dispositions de l’article 4 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000.

2. Motivation de la décision   
La décision de l’inspecteur doit être motivée, c’est-à-dire comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.

2.1 Motivation du motif économique

La décision ne peut se limiter à constater la réalité du motif économique et doit être étayée avec des éléments de faits précis caractérisant le motif économique (difficultés, menace sur la sauvegarde de compétitivité, mutations technologiques, cessation d’activité) au niveau de l’entreprise, ou lorsqu’elle appartient à un groupe, au niveau de l’ensemble des sociétés du groupe œuvrant dans le secteur d’activité concerné par les licenciements.

En matière de procédure collective, la référence à la décision du Tribunal de Commerce de Grande Instance, ou du Juge-Commissaire, autorisant les licenciements est insuffisante.

Les conséquences sur l’emploi, suppression de poste, modification du contrat de travail, ou transformation d’emploi doivent être relevées dans la décision de l’inspecteur.

2.2 Examen des efforts de reclassement entrepris

Une motivation précise est exigée et l’inspecteur ne peut se borner à indiquer que le reclassement n’est pas possible ou que des postes auraient été refusés.
La décision doit préciser en quoi les efforts de reclassements ont consisté et pourquoi ils ont été suffisants ou insuffisants.

2.3 Contrôle de l’absence de lien avec les mandats : non-discrimination
La décision doit sous peine d’illégalité, mentionner l’absence de lien entre le licenciement et les mandats exercés par le salarié protégé.

Cela suppose que la décision mentionne l’intégralité des mandats détenus, brigués ou anciennement exercés par le salarié.

A défaut d’énonciation exhaustive et exacte, de ces mandats,  l’inspecteur du travail sera réputé ne pas avoir été mis à même d’apprécier si des motifs discriminatoires ou d’intérêt général s’opposaient au licenciement du salarié…

La même obligation de mentionner tous les mandats s’impose s’agissant de la demande d’autorisation de licenciement présentée par l’employeur.

2.4 Contrôle de la régularité de la procédure d’information – consultation des représentants du personnel

L’inspecteur du travail est le garant du droit de tout travailleur de participer, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises.

A ce titre, il exerce un contrôle de la régularité des procédures générales de consultation applicables :

• l’information- consultation légale du comité d’entreprise sur la décision économique au titre de ses attributions générales ;

• et l’information – consultation légale des représentants du personnel, comité d’entreprise ou délégués du personnel, sur le projet de licenciement économique, selon les modalités applicables à l’entreprise en fonction de son effectif, de la représentation du personnel existante et de l’ampleur du licenciement économique envisagé.

La décision doit contenir une motivation relative à la régularité de la procédure d’information-consultation des représentants du personnel.

En cas d’irrégularité dans la procédure de consultation du comité d’entreprise, l’inspecteur du travail a compétence liée pour refuser l’autorisation sollicitée.

2.5 Contrôle de la régularité de la consultation des représentants du personnel sur le licenciement du salarié protégé
L’inspecteur doit vérifier que le comité d’entreprise a été consulté sur le licenciement collectif et sur le projet de restructuration avant de donner son avis sur le licenciement du salarié protégé.

Lorsque le mandat du salarié impose la consultation du comité d’entreprise, la décision de l’Inspecteur doit comporter une référence à cette consultation spécifique des représentants du personnel
2.6 Vérification du respect des obligations conventionnelles
Certaines conventions collectives imposent des obligations diverses telles que la saisine de commissions paritaires,  obligations considérées comme des garanties de fond.
Le respect de ces obligations conventionnelles relève du contrôle de l’inspecteur du travail dont la décision doit comporter une motivation en conséquence.
2.7 Ordre des licenciements

Le contrôle des critères d’ordre des licenciements, ne relève pas de la compétence de l’administration, sauf s’il s’agit d’établir une discrimination en lien avec le mandat.
Dès lors, la décision de l’inspecteur ne doit pas contenir de référence à ces critères d’ordre.

2.8 Intérêt général
Si le refus d’autorisation de licenciement est fondé sur un motif d’intérêt général, l’inspecteur doit  énoncer de façon suffisamment précise les éléments qui l’ont conduit à retenir un tel motif, et préciser que le recours à ce motif n’est pas de nature à porter une atteinte excessive aux intérêts en présence.

2.9 Accord du salarié
Très souvent, l’employeur a proposé à l’intéressé un dispositif de départ en retraite ou un autre dispositif de départ volontaire ; dispositif auquel le salarié a pu donner son accord.

L’inspecteur motive alors sa décision en référence à l’accord du salarié.

Or, un tel élément de motivation est illégal. En outre, l’accord du salarié ne dispense pas l’employeur de respecter son obligation d’examen des possibilités de reclassement.

En conclusion, l’arsenal juridique encadrant le licenciement des salariés protégés est très complexe, il mêle règles du droit du travail, et principes issus de la jurisprudence tant administrative que judiciaire.

Dès lors, on ne peut que conseiller aux employeurs de se faire assister tout au long du processus de licenciement du salarié protégé : de l’élaboration de la demande d’autorisation de licenciement jusqu’à l’éventuel recours à l’encontre de la décision de l’inspecteur du travail refusant l’autorisation sollicitée.

Attention enfin, quand bien même l’autorisation de licenciement serait accordée par l’inspecteur du travail, elle pourrait être in fine annulée par la Juridiction administrative pour des motifs liés à la demande d’autorisation ; annulation intervenant souvent bien après le licenciement du salarié, exposant l’employeur à des sanctions financières parfois considérables.

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