La Sarl Y qui a pour activité la vente de robes et de costumes de mariage, a recruté Mme X dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein ayant pris effet le 23 juin 2009 en qualité d’hôtesse de vente, catégorie IV de la convention collective nationale de l’habillement et des articles textiles, moyennant un salaire de 1 500 euros bruts mensuels.
Elle est promue aux fonctions de responsable de magasin, catégorie agent de maîtrise A1, avec un salaire de base réévalué à la somme de 1 700 euros bruts mensuels outre une part variable sous la forme de commissions calculées sur le chiffre d’affaires réalisé.
A l’issue d’une période d’arrêts de travail, lors de la 2ème visite de reprise le 11 décembre 2014, le médecin du travail a émis l’avis suivant concernant la salariée : » Inaptitude médicale à la reprise au poste. Étude de poste faite le 25 novembre. Serait apte à tout poste sans port de charge, station debout prolongée et genoux fléchis « .
Par une lettre du 22 décembre 2014, Mme Y est convoquée… à un entretien préalable prévu le 7 janvier 2015. Lui est notifié le 13 janvier 2015 son licenciement pour inaptitude médicalement constatée et impossibilité de la reclasser.
Nous avons saisi la Cour d’appel de RENNES
Nous estimons que l’inaptitude était d’origine professionnelle et faisait suite à un accident du travail.
En effet, son médecin traitant a diagnostiqué une entorse de la cheville droite en utilisant le formulaire CERFA » accident du travail ‘ maladie professionnelle « , la commission de recours amiable a finalement reconnu le caractère professionnel de cet accident en avril 2013 ce dont la CPAM d’Ille-et-Vilaine a pris acte dans une correspondance du 24 avril, et d’une manière générale elle établissait la connaissance par l’employeur depuis avril-mai 2011 de cet accident du travail.
Nous estimons que la Société avait manqué à son obligation légale de reclassement et n’a pas tenté de rechercher concrètement un autre emploi adapté à ses capacités physiques, dès lors qu’elle a engagé la procédure de licenciement le 22 décembre 2014, seulement 11 jours après la deuxième visite médicale de reprise le 11 décembre.
La Cour d’appel donne raison à l’ancienne salarié :
L’application des articles L. 1226-7 et suivants du code du travail alors en vigueur, figurant précisément dans la section III » Accident du travail ou maladie professionnelle » / sous-section 2 » Suspension du contrat et protection contre la rupture « , n’est pas subordonnée à l’accomplissement des formalités de déclaration d’un accident du travail auprès de la caisse primaire d’assurance maladie, en ce que cette législation protectrice a vocation à s’appliquer même si l’origine professionnelle de l’accident ou de la maladie est seulement partielle dès lors que l’employeur en a eu connaissance.
Les règles protectrices concernant les victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle s’appliquent dès l’instant où l’inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a au moins partiellement pour origine cet accident ou cette maladie et que l’employeur avait bien connaissance de cette origine professionnelle au moment de notifier le licenciement, cette application n’étant pas conditionnée à la reconnaissance par la caisse primaire d’assurance maladie d’un lien de causalité entre l’accident du travail et l’inaptitude, peu important également la décision ultérieure de ladite caisse de ne pas prendre en charge le salarié au titre de la législation sur les risques professionnels.
Mme Y verse aux débats un certificat d’accident du travail – modèle type CERFA – établi par son médecin traitant faisant état d’une entorse à la cheville droite, certificat daté du mercredi 13 avril 2011 et prescrivant un arrêt de travail jusqu’au 13 mai suivant, avec un autre certificat du service des urgences de l’hôpital de Cesson-Sevigné du 13 avril 2011 confirmant l’existence d’un » traumatisme de cheville droit ».
Suite à la demande de la CPAM d’Ille-et-Vilaine dans une correspondance du 13 mai 2011 adressée à Mme …, la Sarl X a établi le 18 mai suivant une déclaration au titre d’un accident du travail survenu le mercredi 13 avril dans la boutique ( » Lieu de l’accident : Au magasin. Circonstances : Remonter du sous-sol, chute dans l’escalier « ), et si dans un premier temps ladite caisse a notifié à la salariée le 9 septembre 2011 un » Refus de prise en charge » de cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels, dans un deuxième temps, après saisine par l’appelante courant octobre 2011 de la commission de recours amiable, il a finalement été reconnu le 23 avril 2013 par cette même instance le caractère professionnel de celui-ci ; avec cette autre précision que le médecin du travail avait déjà alerté la société intimée sur la dangerosité de l’escalier comme il le rappelle dans un courriel envoyé à Mme … ( » ‘ En ce qui concerne l’escalier du magasin X où vous travailliez, j’avais noté sur la fiche d’entreprise établie le 08/03/2010 : escalier abrupt de 14 marches, et noté dans la liste des risques de l’entreprise, celui de chute ‘. « ).
Au vu de l’ensemble de ces éléments, il apparaît que l’inaptitude de Mme Y ., telle que relevée par le médecin du travail le 11 décembre 2014, avait au moins partiellement pour origine l’accident du travail dont elle avait été victime le 13 avril 2011, et que la Sarl X avait bien connaissance de cette origine professionnelle lorsqu’elle lui a notifié le 13 janvier 2015 son licenciement.
Le reclassement, est estimé insuffisant par la Cour d’appel de RENNES qui estime que la Sarl X a manqué à cette même obligation, faute par elle de prouver réellement l’absence de tout autre poste disponible en reclassement au sein de ses deux magasins sur Rennes et Le Mans, poste pouvant être approprié aux capacités de l’intéressée et conforme aux préconisations du médecin du travail.
Les condamnations s’élèvent à 40.000,00 € au profit de l’ancienne salariée.